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Pierre BOUTS, lieutenant au 21ème RI

Je remercie Emmanuel BOUTS de m’avoir confié le journal de son grand-père Emmanuel BOUTS, journal tenu pendant toute la Grande Guerre et de m’avoir autorisé à publier son parcours.

 

Pierre, Georges, Marie est né le 16 mai 1890 à Neuilly-sur-Seine (Seine). Ses parents Maurice, Marie BOUTS et Jeanne, Élisabeth née OLLIVIER habitent 16 rue Ancelle. Son père est avocat.

Pierre est l’aîné d’une fratrie de 6 enfants.

Pierre fait la plus grande partie de ses études à l’Écoles des Roches*

*Créée en 1889, à Verneuil-sur Avre (Eure), l’École des Roches est un établissement privé visant l’excellence grâce à des méthodes pédagogiques innovantes pour l’époque, inspirées du monde éducatif anglo-saxon.

Ses parents ayant acquis une propriété à Louannec (Côtes d’Armor), c’est le centre recruteur de Guingamp qui va le recenser.

Matricule 1123 de la classe 1910, Pierre effectue son service militaire au 12ème Régiment de Cuirassiers à partir du 2 octobre 1911.

Le 12ème Cuirassiers est caserné au quartier de la Vénerie à Rambouillet.

 


Q
uartier de la Vénerie, à Rambouillet

 


© Fonds : Emmanuel Bouts

Pierre est successivement brigadier le 3 février 1912, brigadier-fourrier le 25 septembre 1912 et Maréchal-des-Logis le 27 mai 1913.

Le 8 juillet 1913, il épouse Élisabeth, Louise, Madeleine ÉMY à Versailles.

Pierre est libéré le 8 novembre 1913 et rentre dans ses foyers à Saint-Pol-de-Léon, où il acquiert un fonds de commerce (vente de grains, sels et engrais chimiques).

 

1914

Par décision du Général commandant le 10ème Corps d’Armée (CA) dont le quartier général est à Rennes, Pierre est détaché le 25 juillet comme sergent-major, chef du train régimentaire* du 1er Régiment d’Infanterie Coloniale (RIC) (Cherbourg).

*Ensemble des moyens d’un régiment destinés à fournir ce qui est nécessaire au régiment pour subsister (hommes et chevaux) Les moyens pour combattre sont pris en charge par le train de combat.

Cette unité du 1er RIC relève du 10ème Escadron du Train des Équipages Militaires : Pierre est devenu un ”tringlot”.* 

*Les soldats du Train des équipages sont surnommés les "tringlots" en hommage aux premiers soldats de l'armée napoléonienne chargés du ravitaillement qui étaient armés d'une carabine courte "le tringlot".

C’est pourquoi, le 2 août, à la déclaration de la guerre, Pierre rejoint le 10ème Escadron du Train (dépôt : quartier des Urbanistes à Fougères) et non le 12ème Cuirassiers comme il l'espérait.

 


Le quartier des Urbanistes à Fougères

Pierre est dans la 6ème Compagnie.

13 août, le 10ème CA est chargé de couvrir la Meuse vers Sedan.

Jusqu’au 24 août, il fait mouvement vers Philippeville en Belgique, Pierre est à Louvain.

Le CA participe à la bataille de Charleroi. 

puis, commence la retraite jusqu’à Château-Porcien (200 km en 3 jours) puis Pontavert (Aisne) le 30 août, puis Sézanne le 4 septembre (Marne) et enfin le 6 septembre, Rigny-la-Nonneuse.

La bataille de la Marne oblige les armées allemandes à reculer, commence alors ce qui a été appelé la ”poursuite”.

Le 9 septembre, Pierre est à Boissy-le-Repos (Marne)

À 4 km de là, la 51ème Division d’Infanterie (DI) du 10ème CA s’est emparée du village de Corfélix, champ de bataille que visite Pierre ce jour-là.

Le 13 septembre, la 6ème Compagnie (Cie) est à Ville-en-Tardenois où elle ravitaille le 3ème CA.

Le 30 septembre, la Cie est à Longeau vers Amiens et prend en charge le ravitaillement d’un CA provisoire qui combat en Artois, secteur Oppy-Billy-Montigny.

À partir du 14 octobre, la 6ème Cie est chargée du ravitaillement du 33ème CA qui vient d’être créé par transformation du CA provisoire.

Elle est stationnée à Ambrines (Pas-de-Calais) tandis que les troupes combattent au nord-est d’Arras (Vimy, La Targette,...) au sein de la Xème Armée.

 

1915

Le 22 avril, la Cie fait mouvement vers Troisvaux (Pas-de-Calais)

Le 29 avril, elle vient à Diéval (Pas-de-Calais)

Le 33ème CA combat toujours en Artois dans la région de La Targette et Ablain-Saint- Nazaire.

Le 22 juillet, Pierre demande à servir dans l’infanterie afin d’être intégré dans une unité combattante.

Il est affecté comme sous-lieutenant de réserve à titre temporaire au 21ème RI, à la 5ème Compagnie du 2ème bataillon. 

Le 21ème RI forme avec le 109ème RI la 26ème brigade de la 13ème DI.

Entre le 11 et le 19 juin, le 21ème RI a combattu à notre Dame-de-Lorette où il a subit de très lourdes pertes (près de 800 hommes hors combat). Pierre vient compléter l’encadrement du régiment.

Il arrive au corps le 27 juillet, le 2ème bataillon vient de quitter Houdain pour Bailleul-lès- Pernes.

Le régiment reste au repos et à l’instruction jusqu’au 23 août.

Le 2ème bataillon est positionné à Bouvigny à l’est de Lens. Il alterne en ligne avec un bataillon du 109ème RI.

Le 20 décembre, le bataillon est mis au repos à Fleury (Pas-de-Calais).

 

1916

Le 1er février, le bataillon est dans le camp de Saint-Riquier (Somme).

Alors que la Division se prépare pour une attaque prévue sur la Somme, c’est vers Verdun que, le 3 mars, elle est envoyée.

Les Allemands viennent de lancer une violente attaque sur Verdun qui était, finalement, peu gardé. Au vu du symbole que représentait Verdun, sa perte aurait eu un retentissement considérable d’où la volonté de la défendre à tout prix ( et quel prix!)

 

Amené en camions, le 2ème bataillon est positionné à l’est du ravin de Vaux- fort de Douaumont.

 


Le secteur du 21ème RI à Verdun en mars – source : AFGG

 

 Le secteur est mis en défense malgré un bombardement très violent. Les pertes sont sévères plus de 700 hommes hors combat.

Le régiment est relevé le 12 mars et vient cantonner à Haudainville (le lieu de cantonnement est sur les péniches amarrées sur les rives de la Meuse ou du canal de l'Est). 

Le 21ème RI passe à 2 bataillons compte tenu des pertes et l'un de ces bataillons est envoyé le 16 mars dans les tranchées du Tillat sous le fort de Tavannes. Le bataillon est en réserve de Corps d'Armée. Malgré la violence des bombardements et des attaques de l'infanterie allemande, le bataillon ne sera pas engagé et revient à Haudainville le 19 mars, puis va en repos à Aulnois-en-Perthois (Meuse).

Le 6 avril, il vient prendre un secteur près de Tahure en Champagne.

Secteur relativement calme (?), qu’il quitte le 20 juillet.

La bataille de la Somme étant déclenchée pour soulager la pression sur Verdun, le régiment vient le 11 août à Grandvilliers. 

Le 13 août, Pierre passe sous-lieutenant à Titre Définitif, il est maintenu au 21ème RI.

Le 16 août, il entre en ligne entre Estrées et le bois de Soyécourt.


Source : blog HistoireGéographie

  

Le 21 août, le 2ème bataillon prend le bois de Schleswig mais, malgré une défense acharnée où Pierre se fait remarquer, il ne peut le conserver.

Cette attaque coûte près de 200 hommes.

Pierre est cité à l'ordre de la 13ème Division le 11 septembre 1916 :

Officier courageux, ayant du sang-froid et une énergie tenace. Dans la nuit du 21 août et le 22 août a maintenu son peloton en liaison avec le corps voisin sous un bombardement très violent. Le 22 août, dans la nuit, menacé d’être tourné et obligé de battre en retraite, a défendu pied à pied le terrain en se repliant sur la position principale où il s’est établi et maintenu malgré les assauts furieux de l’ennemi.

La citation s’accompagne de la Croix de guerre avec étoile d’argent.

Le régiment est au repos à Harbonnières. Mais dès le 8 septembre vient ré occuper le bois de Soyécourt, puis avance sur Deniécourt.

Le 14 octobre, le régiment est relevé et vient à Maisoncelle (Pas-de-Calais).

Le 20 octobre, Pierre est désigné comme formateur à l’École d’Instruction des chefs de section de l’Armée à Beauvais, puis vers Amiens.

 

1917

Après un passage à l’École des Élèves-Officiers de la IIIème Armée à Maucourt (Somme), Pierre rejoint le 21ème  RI à Retzwiller dans la région de Dannemarie (Haut-Rhin) où le régiment met le secteur en zone défensive

Embarqué le 14 avril depuis Héricourt (Haute-Saône), le régiment est placé en réserve de division à Château-Thierry (Aisne). La bataille dite du Chemin des Dames est déclenchée.

L’attaque ayant échouée, le régiment n’est pas engagé et le 18 mai, il vient dans le secteur d’Aizy-Jouy. 

Le 3 juin, il est déplacé dans l’Aisne dans le secteur du “moulin de Laffaux”où il aménage le secteur.

 Fin août, Pierre passe au Dépôt Divisionnaire* à Taillefontaine, près de Villers-Cotterêts.

*Situé en arrière du front, le dépôt divisionnaire gère les renforts. Tout soldat rentrant de convalescence, venant des dépôts régimentaires, passe par le dépôt divisionnaire où il est rééquipé, et réarmé, où il reçoit un complément d’instruction. 

Le 14 octobre, Pierre est promu lieutenant de réserve dans la Cavalerie (pour prendre rang le 22 juillet), promotion parue au JO du 17 octobre 1917). Il reste dans l’infanterie au 21ème RI, 5ème compagnie.

De retour du Dépôt, Pierre est nommé officier de liaison de la 13ème DI.

 


La bataille de La Malmaison

 

Le 23 octobre, 2ème bataillon en tête, le 21ème RI attaque en direction de la ferme Vaurains. prend ensuite la ferme de Rosay et vient dans la forêt de Pinon jusqu’à la rive de l’Ailette.

Le 30 octobre, Pierre est major du cantonnement de Sancy-les-Cheminots (Aisne)*.

*Officier chargé du logement des officiers et des soldats dans le lieu où cantonne le régiment. En liaison avec le maire du lieu, il réquisitionne les habitations, a un rôle de police, …

Le 8 décembre, le régiment est au repos à Villersexel (Haute-Saône).

 

1918

Jusqu’au 16 mai, le régiment occupe un secteur dans la haute vallée de la Fecht à Metzeral-Sondernach.

Il vient au repos à Dormans, mais le 27 mai, les Allemands déclenchent une violente attaque qui fait plier le front. Le régiment est envoyé vers Romain pour bloquer l’offensive.

Le 28 mai, la 13ème DI est dans le secteur de Fismes. Le 21ème RI se bat dans le village de Courville.

La section commandée par Pierre est dans la ferme de Bonne-Maison.

 


Le 28 mai , Pierre est fait prisonnier    source : AFGG

Submergés par le nombre et à court de munitions, les survivants doivent se rendre.

Pierre et ses hommes sont faits prisonniers et conduits à Fismes.

Commence alors le chemin vers le camp de Rastadt en Bade qu’il atteint le 24 juin. Le camp est installé dans la forteresse de Friedrichferte puis le 25, Pierre est dans le camp annexe appelé “ Russenlager” à quelques kilomètres de Rastadt. C’est un camp de triage.

 


Fiche de renseignement adressée par la famille de Pierre, via la Croix-Rouge Internationale

 


Le camp de Rastadt

Le 10 août, Pierre est transféré, plus au nord, dans le camp de Osnabrück dans le Hanovre.

 


Extrait du registre de prisonniers français au camp de Osnabrück

 

1919

Pierre revient au dépôt du 21ème (Langres) le 25 janvier. 

Le 15 avril, il est démobilisé par le 19ème RI (Brest) et rentre dans ses foyers à Louannec.

Le 23 juin, Pierre est cité à l’ordre de l’Armée (parue au JO du 8 septembre 1919) :

Officier très brave et d’une haute valeur morale. Le 28 mai 1918, au sud de Fismes, a réussi grâce à son énergie à tenir en échec pendant plusieurs heures des forces allemandes très supérieures et n’a succombé sous le nombre qu’après avoir épuisé toutes ses munitions.

Une palme s’ajoute sur le ruban de sa Croix de guerre.

La Ville de Verdun lui attribue la Médaille de Verdun. 

Le 28 novembre 1929, Pierre reçoit sa carte d’Ancien Combattant et peut porter la médaille afférente.

 

    

 

Pendant la seconde Guerre Mondiale, Pierre s’engage dans la Résistance et, à ce titre, est titulaire :

  • de la Médaille commémorative des services volontaires à la France Libre
  • de la Médaille du Combattant volontaire de la Résistance

 

Membre de l’Union Nationale des Combattants au titre des 2 guerres mondiales, il est titulaire de la Médaille de cette association. 

 

Pierre décède le 9 juin 1975 à Condorcet (Drôme).

 


Sources bibliographiques et iconographiques

Archives départementales des Hauts-de-Seine

Journal tenu par Pierre BOUTS pendant la Grande Guerre à consulter sur www.chtimiste.com/carnets/Bouts

SGA, Mémoire des Hommes

  • JMO de la 6ème Cie du 10ème Escadron du Train – 26N 1336/9
  • JMO du 21ème RI – 26N  593/2

BnF, Gallica

  • Historique du 21ème RI  Imp. moderne  Langres 1920

https://grandeguerre.icrc.org/fr

www.geneanet.org

www.unabcc.org / le Lien décembre 2018 

www.jpdornec.blogspot.com